Représentation de Hel, la déesse nordique des enfers - AI generated
Rate this page
Représentation de Hel, la déesse nordique des enfers - AI generated

La mythologie nordique regorge de personnages captivants et complexes, mais peu d’entre eux égalent Hel en mystères et en symbolisme. Déesse des enfers, fille du dieu Loki et de la géante Angrboda, Hel règne sur le royaume souterrain de Helheim. Ses représentations, oscillant entre la vie et la mort, et son rôle crucial dans les mythes nordiques, notamment celui de Baldr et le Ragnarök, en font une figure à part dans le panthéon nordique. Découvrez ses origines, son apparence, son royaume, ses interactions mythologiques et son impact sur la culture moderne.

I. Origines de Hel : à la croisée de Loki et Angrboda

Hel est issue de l’union entre Loki, le dieu farceur et souvent chaotique, et Angrboda, une géante vivant dans le Járnviðr (la forêt de fer). Leur descendance, marquée par l’étrangeté, comprend trois figures : Fenrir, le loup monstrueux destiné à tuer Odin lors du Ragnarök ; Jörmungand, le serpent de Midgard qui encerclera le monde ; et Hel, qui incarne le royaume des morts.

Sa naissance dans le royaume des géants, Jotunheim, place d’emblée Hel dans une lignée redoutée. Dès sa jeunesse, sa nature hybride – moitié vivante, moitié morte – suscite la méfiance des dieux. Son corps est divisé en deux moitiés : l’une belle et vivante, l’autre cadavérique, bleue ou noirâtre, marquée par la décomposition. En découvrant la prophétie selon laquelle les enfants de Loki provoqueront la chute des dieux, Odin décide de disperser les trois rejetons. Il précipite Hel dans les profondeurs de Niflheim, où il lui confie le règne sur les morts, qui ne trouvaient pas leur place au Valhalla ou au Fólkvangr, les domaines réservés aux guerriers tombés au combat. Là, elle devient souveraine d’un royaume qui porte son nom : Helheim. Hel devint alors la souveraine incontestée des morts décédés de vieillesse, de maladie ou de toute autre manière « non glorieuse ».

Ce monde souterrain, glacial et brumeux, accueille les âmes de ceux qui ne sont pas morts au combat – vieillesse, maladie, accidents. Il se distingue du Valhalla ou du Fólkvangr, réservés aux guerriers valeureux. Helheim est un lieu ni infernal ni paradisiaque : il est neutre, froid, silencieux. Le palais d’Hel, Éljúdnir, est lugubre : l’entrée de ce royaume est gardée par Garm, un loup féroce souvent comparé au Cerbère des mythologies grecques. Une fois passé le pont Gjallarbrú, les morts sont accueillis dans un lieu où le froid règne en maître. Un grand hall dont le nom signifie « humide de pluie » les accueille dans leur nouvelle demerue. Ce nom reflète l’atmosphère morose et désespérée qui imprègne ce royaume. Le lit d’Hel se nomme « Maladie », son couteau « Famine », son seuil « Perfidie ». Elle est assistée de deux serviteurs, Ganglati et Ganglöt, si lents qu’ils paraissent figés. Malgré cette austérité, Hel est une figure d’ordre, régissant l’après-vie avec une autorité intransigeante mais juste. Elle ne peut quitter son royaume, tout comme ceux qui y entrent ne peuvent en ressortir.

II. Les légendes qui lui sont associées

La légende la plus célèbre associée à Hel est celle de la mort de Baldr, le dieu de la lumière, fils d’Odin. Trompé par Loki, le frère aveugle de Baldr lance une flèche de gui, seule chose n’ayant pas juré de ne pas lui nuire. Baldr meurt, et son âme descend dans le royaume d’Hel. Odin envoie alors Hermod, messager des dieux, la supplier de rendre son fils bien-aimé. La déesse accepte à une condition : que chaque être vivant et chaque chose dans les Neuf Mondes pleure Baldr. Tous s’exécutent, sauf une géante nommée Thökk – que l’on soupçonne être Loki déguisé – qui refuse de verser une larme. Par cette unique réticence, elle conserve Baldr dans son royaume, scellant ainsi son destin jusqu’au Ragnarök.

Une autre légende importante touche au Naglfar, le terrible navire des morts. Fabriqué à partir des ongles des défunts, il est destiné à transporter les armées du chaos au Ragnarök. Hel, selon plusieurs traditions, est en train de le construire dans les profondeurs de son royaume, attendant le moment où elle pourra envoyer ses morts rejoindre Loki et les géants. Ces récits montrent qu’elle n’est pas une déesse de la vengeance, mais plutôt la gardienne d’un équilibre, incarnant la loi immuable de la mort.

III. Ses amours et sa descendance

Les textes anciens mentionnent très peu la vie sentimentale ou familiale de Hel. Toutefois, dans la Saga des Ynglingar, l’historien Snorri Sturluson raconte que le roi suédois Dyggve devint son époux après sa mort, la rejoignant ainsi dans l’au-delà. Ce mariage posthume, plus symbolique que romantique, rappelle les unions mystiques entre monde des vivants et des morts dans diverses traditions indo-européennes.

Aucun enfant n’est attribué à Hel dans les sources classiques, mais certaines interprétations modernes ou ésotériques voient dans les morts eux-mêmes ses « enfants symboliques », puisqu’elle veille sur eux et les maintient dans son royaume. Ce silence sur sa descendance renforce l’aura énigmatique de la déesse, qui n’est définie ni par une lignée, ni par une postérité, mais par la permanence de sa fonction cosmique.

IV. Son culte et son rôle dans le Ragnarök

Dans les croyances anciennes, elle ne faisait pas l’objet d’un culte organisé comme celui d’Odin ou de Thor, mais elle était redoutée et respectée, notamment par ceux qui ne mourraient pas au combat. Elle représentait un destin commun, inévitable, et les Vikings prenaient soin d’éviter d’offenser celle qui régnait sur leur dernière demeure. Des sépultures naviformes (en pierres ou en bateaux) étaient parfois érigées pour symboliser le voyage vers Helheim, et des rituels étaient pratiqués pour accompagner les défunts dans l’au-delà.

Au Ragnarök, Hel joue un rôle clé bien qu’elle n’apparaisse pas directement sur le champ de bataille. Elle envoie une armée de morts pour soutenir son père Loki et les forces du chaos. Ceux-ci embarquent à bord du Naglfar, qui fend les mers pour rejoindre les plaines du combat final. Dans certaines versions, elle met également un second navire à disposition des géants du feu. Son rôle illustre la montée en puissance des forces de l’ombre et du renouveau. Ainsi, bien qu’elle ne combatte pas elle-même, elle participe activement à l’effondrement de l’ordre ancien, prélude à la création d’un monde nouveau.

Hel continue d’exercer une fascination dans la culture contemporaine, bien au-delà des frontières de la Scandinavie. Son nom a influencé plusieurs langues : « Hell » en anglais, « Hölle » en allemand, ou encore « Helvete » en suédois et norvégien, tous désignant l’enfer. Pourtant, à la différence du concept chrétien, Helheim n’est pas un lieu de punition. Cette ambiguïté a inspiré de nombreux artistes, écrivains et créateurs. Dans les jeux vidéo (comme God of War: Ragnarök, Smite, Unforgiving: A Northern Hymn ou Dungeons & Dragons), elle est représentée comme une entité ténébreuse et puissante. Dans les comics Marvel, la déesse Hela est librement inspirée de Hel, bien qu’elle y soit la sœur de Thor, ce qui n’a pas de fondement mythologique. En musique, notamment dans les genres métal ou folk nordique, Hel est fréquemment évoquée comme une figure de la mort majestueuse et solennelle.