La relation entre les humains et les fées est empreinte de respect et de prudence dans la mythologie celtique, surtout en Irlande. Néanmoins, les interactions entre ces deux univers ne sont pas dépourvues de tensions. On accuse souvent les fées d’intervenir mystérieusement dans le monde humain, en particulier en ce qui concerne leurs enfants. Une croyance répandue soutient que les fées remplacent parfois les nourrissons humains par des changelings. Découvrons ensemble qui sont ces substituts d’enfants.
I. Origines des Changelings
Leurs origines se perdent dans les brumes du temps, mais selon les légendes, ils sont étroitement liés aux Sidhes, les êtres féeriques habitant les collines et les vallées de l’Autre Monde. Ces récits évoquent souvent des échanges d’enfants entre les Sidhes et les humains, où les bébés humains sont remplacés par des changelings, des créatures semblables en apparence mais étrangement différentes en nature. La légende la plus répandue suggère que les fées, qui endurent des accouchements particulièrement douloureux donnant naissance à des enfants difformes, sont incapables de tolérer la laideur dans leur monde idéalisé de beauté. Pour remédier à cela, elles se rendent dans le monde des humains pour enlever un bébé humain sain et beau, laissant à sa place leur propre progéniture malformée.
Les récits entourant les changelings, ou enfants échangés, peuvent varier. Certains prétendent qu’il s’agit en fait de vieilles fées en quête de confort qui se substituent à des humains pour finir leurs jours en paix. D’autres encor »e croient que le changeling est simplement un morceau de bois enchanté, laissé dans les berceaux humains par des fées malicieuses pour tromper les parents avec une illusion de leur enfant.
Pour protéger leurs enfants, les parents d’autrefois avaient recours à divers stratagèmes comme placer un manteau retourné ou des ciseaux ouverts dans le berceau pour éloigner ces êtres surnaturels. La peur était si grande que certains parents ne quittaient jamais leur enfant des yeux.
II. Comment identifier un changeling et s’en protéger
Les changelings étaient réputés pour leur apparence trompeuse et leurs comportements étranges. Bien qu’ils ressemblent aux enfants humains, ils étaient souvent décrits comme étant pâles, maladifs et silencieux, contrastant avec l’énergie et la vitalité des enfants ordinaires. Leurs yeux étaient parfois décrits comme étant vides ou étrangement lumineux, reflétant leur lien avec le monde des fées. Les méthodes pour identifier un changeling variaient grandement. En Irlande, il était courant de tenter de révéler un changeling en stimulant sa curiosité de manière inhabituelle, comme en faisant bouillir des coquilles d’œufs, ce qui, selon la croyance, poussait le changeling à révéler son âge et son origine de surprise.
En plus de leur apparence distinctive, les changelings étaient également dotés de pouvoirs surnaturels. Selon les légendes, ils étaient capables de manipuler les éléments, de prédire l’avenir et même de provoquer des maladies ou des accidents chez ceux qui les entouraient.
III. Comment procéder à l’échange
Conserver un changeling chez soi avait pour réputation de porter malheur au foyer. Toutefois, les parents devaient traiter cet être avec soin et amour pour garder une chance de retrouver leur propre enfant. Si le changeling venait à être maltraité (via des méthodes extrêmes telles que les coups de fouet ou en le plaçant dans un four chaud), les fées étaient censées infliger le même traitement à l’enfant humain kidnappé.
Si le changeling retrouvait santé et bonheur, sa mère fée était incitée à reprendre son enfant et à rendre l’enfant humain en échange. Les fées sortant rarement, sauf une fois par an, cette période était propice pour tenter un nouvel échange en suivant des rituels précis. Dans certaines régions d’Irlande où les fées sont perçues comme diaboliques, on croit que le changeling est possédé et peut nécessiter un exorcisme, souvent par des moyens extrêmes.
Si toutes les tentatives échouent, le changeling grandira au sein de la famille humaine, devenant souvent un adulte simple d’esprit et maladroit. Malgré ces défis, les parents pouvaient se consoler en imaginant que leur enfant véritable menait une vie épanouissante dans le monde des fées, entouré de joie, de musique et de danse irlandaise.
IV. La tristesse et l’horreur derrière ce mythe
Les premières mentions des changelings remontent à des siècles, faisant écho aux croyances profondément enracinées dans la culture celtique. Ces histoires étaient souvent utilisées pour expliquer les maladies et les comportements étranges observés chez les enfants, offrant un réconfort aux parents désemparés face à l’inexplicable. En Angleterre, on croyait que les changelings pouvaient être consumés par le feu comme le bois, ce qui a malheureusement mené à des actes de violence contre des enfants jugés indésirables ou différents, accusés d’être des changelings.
Certains parents plaidaient cette cause pour expliquer l’injustifiable: l’infanticide… (« non, Monsieur le Juge, je n’ai pas tué mon enfant, mais le changeling qui a pris sa forme »). Dans au moins un incident, une femme fut même traduite en justice pour avoir tué son enfant qu’elle croyait être un changelin de cette manière.
Jusqu’au XIXe siècle, des enfants étaient parfois maltraités pour cette même raison, perçus comme étant des changelings envoyés par le Diable.
Cette croyance en les changelings perdure depuis des siècles, inspirant même William Shakespeare dans « Le Songe d’une nuit d’été » et plus tard Margaret Mitchell dans son roman « Autant en emporte le vent ». Une bande dessinée sur le sujet a vu également le jour.